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Tuesday, July 29, 2008

24 heures aux portes de l’enfer et du paradis.

Mercredi matin, 6h30. Mon réveil sonne.
Je suis éveillé depuis 10 minutes par les cris des chiens, du coq, et ces couleurs typiques de l’Asie.
Quel est le programme de ma journée ? Rien de bien particulier. L’évêque et son vicaire général sont partis une semaine pour une retraite dans le sud du Cambodge. Je suis le seul étranger à l’évêché.

Rapidement, je passe en revue les activités de ma journée :

- 7h00 : prière ;
- 7h20 : petit déjeuner ;
- 9h00 : J’ai dit au papa du petit garçon qui est mort la semaine dernière d’un accident que j’irai chez eux pour la fête qui est toujours donnée 7 jours après un enterrement. Ce petit garçon de 4 ans est mort dans ma voiture pendant son transfert à l’hôpital de Phnom Penh. Il a été renversé par une moto alors qu’il traversait la route. Diagnostic de l’hôpital de Kampong Cham : traumatisme crânien, AVC et coma profond ;
- Matinée : être présent au bureau pour m’occuper de la gestion du diocèse, monter
quelques dossiers de financement et assurer le suivi des élèves qui ont passés des
concours pour entrer à l’université en septembre prochain ;
- 12h00 : déjeuner ;
- 14h00 : cours d’informatique à Phum Thmey (3 heures) ;
- 17h00 : rendre visite à des familles sur le chemin du retour ;
- 19h00 : dîner.

Donc une journée normale.

Mais, lors de mon petit déjeuner, Gérald m’appelle et me demande si je peux aller à Phnom Penh. Un monsieur de 33 ans y est à l’hôpital en train de mourir et il souhaite mourir chez lui. Il habite Kodol Leu, un village à 4 heures de route de PP, dont une heure de piste. Il est donc prévu que je fasse l’aller-retour à Phnom Penh et que je sois rentré dans la soirée.
Départ vers 10h30 juste après la fête donnée pour l’enfant. Quant au cours que je dois assurer à Phum Thmey, j’ai le temps de prévenir mes élèves que je ne pourrai pas venir. Je demande à la responsable des malades de Kampong Cham si elle a des malades à emmener à PP. ll y a en effet une maman et son fils, qui a un problème important à soigner. Elle m’accompagnera donc à l’aller.
Arrivée à PP (le lieu de RDV est l’église située à l’entrée de PP) à 12h30. Je fais le tour du bâtiment de soins du presbytère en demandant s’il y a un monsieur (ProsSol) et sa femme (SreySi), de Kodol Leu, qui doivent partir au plus vite. Seule réponse que j’obtiens : “Ils sont à l’hôpital” – Je ne le crois pas puisque Gérald m’avait dit qu’ils seraient sortis de l’hôpital et qu’ils m’attendraient à l’église. Jefinis par trouver le numéro de téléphone de SreySi. Elle était effectivement à l’hôpital au chevet de son mari et me rejoins en moto-dop au bout de 20 minutes. Après quelques instants, elle finit par me lâcher que son mari n’est pas sorti, que les médecins souhaitent qu’il reste une journée de plus pour lui injecter de quoi supporter le trajet.
Nous partirons donc demain.

Je l’accompagne à l’hôpital et y reste une heure pour passer du temps avec la famille. Un séminariste – originaire de Kodol Leu – est aussi là et me dit “j’espère qu’il n’y aura pas de problèmes pendant ton retour”. Je quitte l’hôpital et cherche à joindre des amis à PP car il est 17h00, que vais-je faire de ma soirée ? J’appelle le docteur Paul en passant devant chez lui. Il me répond qu’il a déménagé et qu’il est
occupé à réparer sa moto.
Je m’arrête donc à l’évêché, chercher du courrier, faire une petite prière à l’oratoire, discuter avec le gardien et la secrétaire (soeur de l’ancien évêque tué par les Khmers rouges).
À 18h15, il y a une messe dans un centre de jeunes juste à coté. J’y suis invité par deux étudiantesde Kampong Cham. Je suis impressionné par le recueillement des étudiants, et par la proportion de garçons plus importante que celle de filles. C’est vraiment beau à voir. Puis je dine avec les deux étudiantes et trois de leurs amis. Dîner super, très bon, très agréable, amical, dans une ambiance extrêmement chaleureuse et taquine.
Vers 19h30 je quitte mes amis pour rejoindre la maison des coopérants où un dîner a été préparé par Nathalie – une nouvelle coopérante. J’espère y retrouver un peu de saveur française. Nouvelle ambiance, les blagues et les piques volent, nous rigolons bien.
Après ce deuxième dîner fort sympathique, personne n’a envie d’aller dormir. Nous décidons donc de
nous rendre dans le beer garden qui fait l’angle de la rue. J’y retrouve une ambiance que j’aime voir en tant que spectateur – même si l’ambiance est très très malsaine. Atmosphère asiatique : les hommes sont avachis sur une table, un pichet de bière en face d’eux (c’est malheureusement déjà le 4eme ou 5eme) et, souvent, une serveuse sur les genoux.
Nous avons vue sur les chambres et, avec Vianney, nous nous amusons à compter les allées et venues. Nous sortons de cet endroit vers minuit et demi. Etienne, Vianney et Céline souhaitent aller dormir.

Béné et moi continuerions bien la soirée. Nous décidons de nous rendre au Martini – lieu de déprave par excellence à Phnom Penh.
Nous arrivons un peu tard pour un jour de semaine, mais il reste quelques clients – les habitués. Le cadre est typique du bar pour « expat’ » – plantes tropicales, billards, musique européenne, lumière tamisée.
Carte d’identité du Martini ce soir là :
Il reste 6 ou 7 hommes, le double de filles.

Population :
- Les hommes : des Blancs, des Chinois, des Coréens ou des Japonais.
- Les femmes : de jolies petites Khmères – sans doute les soeurs ainées des enfants à qui nous donnons des cours dans les villages perdus.

Moyenne d’âge :
- Les hommes : 55 ans
- Les femmes : 22 ans

Poids:
- Les hommes : 95 Kilos
- Les femmes : 45 kilos

Nous nous installons au bar, je sirote un Ricard. Nous refaisons le monde pendant une bonne heure jusqu’à ce que je lève le nez de mon verre pour m’apercevoir qu’il n’y a plus personne. Juste quelques filles imbibées d’alcool. Nous rentrons, il est 2h30.
Le lendemain je suis à 10h00 à l’hôpital. Nous en partons à 11h30, après avoir fait la queue pour obtenir des médicaments et un papier officiel du médecin permettant de transporter ProSol. Je sens que sa femme est usée par l’attente, elle est fatiguée d’être là, elle est pressée de rentrer chez elle.
Elle sait que son mari va mourir dans les prochaines heures ou les prochains jours. La soeur de ProSol (Savanna), son frère (Voutchii), ainsi que son fils ainé (10 ans) sont là. Le frère et la soeur ont pris deux jours pour accompagner le malade jusque chez lui. Ils retourneront à Phnom Penh le lendemain, vendredi, pour être au travail à 6h00 du matin. Tout le monde monte dans la voiture, je refuse de mettre l’enfant et Savanna à l’arrière de la voiture. Je trouve cela horriblement dangereux, même si les Khmers adorent être dans le pick-up. Nous restons coincés une heure à la sortie de Phnom Penh, sur le pont Japonais qui enjambe le Tonlé Sap en direction de Kampong Cham. ProSol ne se plaint pas trop alors que je devine qu’il souffre le martyre.
Après cet embouteillage, nous roulons vers Kodol Leu. Un violent orage nous devance laissant derrière lui une route détrempée et des arbres en travers de la route, ce qui ne rend pas la circulation sur l’axe routier le plus important du Cambodge très fluide ☺
Nous voilà à Strueng Trong, il est 16h00, le bac vient de partir nous devons attendre le suivant 20 minutes. Pendant ce temps d’attente je suis spectateur d’un échange de regard plein d’amour entre ProSol et SreySi. Cela fait 5 ans que ProSol est malade et ils s’aiment encore. Quelle belle leçon pour moi, européen, pour qui la notion d’amour est si souvent bafouée, critiquée, etc …
Au moment d’arriver chez eux, SreySi prend l’un de ses enfants dans ses bras et l’embrasse avec une telle tendresse, lui passe la main sur le visage et dans les cheveux avec une telle douceur. Je suis touché par ces gestes de maternité. Cela peut sembler “banal”, mais au Cambodge les expressions d’amour sont plutôt taboues.
Après avoir déposé ProSol et sa femme chez lui, comme je n’ai pas le temps de retourner prendre le dernier bac pour rentrer à Kampong Cham, je décide de dormir au presbytère de Kodol Leu. J’y retrouve deux jeunes qui travaillent pour l’Eglise et qui organisent des activités en faveur des enfants et des adolescents. Ils travaillent avec moi à Kampong Cham. Cela me fait plaisir de les voir.
Nous allons passer une bonne soirée. A 17h30, j’assiste au cours d’hygiène qu’ils donnent. Puis dîner, préparé par la femme du malade. Magnifique cadeau de remerciement. Ils ont tués une poule pour moi et m’ont fait une omelette, jamais je n’en ai mangé d’aussi bonne. Je suis extrêmement touché par ce geste. Dire qu’elle a pris le temps de me préparer un dîner alors que son mari ne va pas bien du tout, que nous avons roulé pendant plus de quatre heures (dont une bonne heure de piste rendue très mauvaise par la pluie) et que cela fait des jours qu’elle n’est plus à la maison. Je reste bouche bée. Après le dîner, les deux jeunes tiennent une réunion pour faire le point sur une rencontre d’enfants à Kodol Leu la semaine précédente. Excellente ambiance, prière, blagues et mises en boite vont bon train.
Le lendemain avant de repartir, je rends visite à ProSol et SreySi. ProlSol est sous deux couvertures, il n’est pas bien. Nous disons une rapide prière avec SreySi. Au moment de partir, Prosol trouve la force de me remercier. Je suis content, il en est conscient, je lui dis qu’il a une belle famille et que ses enfants sont de beaux enfants. Il pleure. Je me retire discrètement en disant au revoir à SreySi.
Je suis très ému.
Le matin même je m’étais levé à 5h30 et j’étais allé faire un tour sur les berges du Mékong. Quel fleuve ! Que ces paysages sont beaux ! En face de moi le fleuve s’école paisiblement, la brume est suspendue au dessus de l’eau, une jonque descend le fleuve, remplie de bois et bien en dessous de la ligne de flottaison. Derrière encore, une falaise, en arrière plan, la forêt tropicale, et au loin, des
fumées de déforestation s’élèvent dans ce ciel si beau. Je me promène dans le village, je croise un gros camion embourbé, j’essaie de donner un coup de
main, sans grand succès.
Je rentre à l’église, l’institutrice des maternelles est là, nous échangeons quelques mots. Je la connais bien, elle est sympa comme tout. Je joue un peu avec les enfants. Puis discute une demiheure avec une jeune fille qui tient l’église et s’occupe de préparer les repas quand il y a un prêtre ou des invités. Elle me parle de ses frères et soeurs, de ses parents. Ils sont très pauvres, elle a du arrêter d’aller à l’école, faute d’argent. Il faut choisir : payer l’hôpital pour sauver sa maman ou payer l’école. Elle avait 11 ans.

Il est 8h00, je la remercie pour son accueil et pour notre conversation. Elle me prend la main en
signe de sympathie, c’est vrai que nous venons de parler coeur à coeur, mais je dois repartir. Je prends Savanna et Voutchii dans ma voiture pour qu’ils puissent prendre, à Kampong Cham, un bus en direction de PP à partir. Savanna et Voutchii sont serveurs dans un restaurant tenu par un Français. Ils gagnent 120 dollars par mois chacun. 35 dollars de loyer pour deux et la nourriture à PP est cher. Dure la vie … Mais ils sont heureux. Nous ne parlons pas de leur frère.

Dans la voiture Savanna me pose deux questions que les Khmers posent souvent.
1er question : Mais pourquoi venir au Cambodge aider les Khmers ?
2eme question : Mais pourquoi retourner en France si tu aimes autant notre pays ?

Pourquoi ne pas te marier avec une Khmère ?
A la première question, difficile de faire comprendre que j’ai souhaité arrêter de travailler pour ne pas passer ma vie à «faire ma part» comme disent les Canadiens. Ce qui me rend heureux, ce n’est pas d’amasser le plus d’argent possible (il en faut, c’est très important), mais c’est d’aider les autres.
A la seconde question, Savanna a bien compris que je souhaitais me marier. Mais elle me demande : « pourquoi pas avec une Khmère ? Je rencontre de nombreux couples à Phnom Penh : elle, Khmère, et lui, d’une autre nationalité ». Je lui réponds qu’il est difficile, mais pas impossible, de s’aimer et de construire une famille, lorsqu’un couple ne parle pas le même langage, lorsque les cultures sont si différentes, lorsque la manière de penser ne suit pas les mêmes schémas.
Voilà, 24 heures d’un spectateur des scènes les plus laides qui peuvent exister sur terre, mais aussi des plus belles. Nous pourrions retrouver la même chose dans tous les pays du monde, de façon plus ou moins visible.

Pour terminer, j’ai envie de reprendre la quatrième de couverture du livre de Maurice Zundel « Croyez vous en l’homme ? » :
« On prétend qu'un éminent physicien, à qui on avait posé la question «Croyez vous en Dieu ?», aurait répondu : «et vous, croyez-vous en l'homme ?»







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